• Les 'guetteurs' de Christian Diverrès.

     

    Les 'guetteurs' de Christian Diverres.

     

    A Christian Diverrès

     

              Des statues jets, statues pieux, statues repères arrivent au-delà du bois, par-delà la terre, le fer et la cire, au-travers de la couleur et des gravures. A ce rendez-vous qui semble fortuit nous sommes à l’heure, à leur temps pour une rencontre. Chacune a cette marque originelle qui fabrique une unité de leur diversité. Dans l’immobilité s’écrit une ascèse, un mouvement hors du geste. Depuis le feu des couleurs et leurs éclats, leurs empreintes se dessinent un chemin vers la terre et ses teintes de force et de cuisson. Terre brûlée, fumée, du même habit de bure que scandent les dernières arrivées. Une rencontre entre des mendiants en figures et des mendiants d’humanité, et c’est un ravissement. Ou peut-être est-ce seulement une âme rendue à la solidité brute de la matière ? Ces veilleurs auraient-ils une âme ? Nés de la main regard et sang et de l’œil rêves, visions et modelage. L’œil, le regard donneraient la forme, le visage. Leurs visages, ce peu de détails, presque polis dans une matière rude, nous offrent ce miroir où nous retrouvons notre visage et tous ceux que nous portons comme des reflets fragiles.

              Bergers des temps de débandade sur les déserts que nous fabriquons, ils semblent voir arriver d’autres temps, d’autres espoirs. Maasaï, peuples bergers de la vallée de l’Omo, coureurs de l’immobile, guetteurs des plaines hauts levés sur une jambe, arpenteurs des pays de longues steppes, mendiants ou rois détiennent-ils les secrets des éléments qui les bâtissent et qui à nous aussi donnent structure ? Chanteurs, leurs bouches closes. Chanteurs au cœur du bois, au centre de la matière, vibration subtile qu’il nous faut décrypter. Certains parlaient d’une voix imperceptible qui m’effleurait et courait sur ma peau et mon regard. Tout en regard depuis leurs yeux intérieurs ils n’ont aucun besoin d’être re-présentés Sur la pâleur d’un visage de peu de gestes. Leur absence illumine ces visages plus réels qu’une image toute pétrie de formes. Sculptures d’élan, d’idée et de parole, gardiennes des plis et des tissus, du fer et des langages gravés sur les chemins d’écho de leurs corps, sur leurs vêtements. Nous répondons à leurs messages par la résonance que répercutent nos corps. Toute la force de l’élan et la sérénité des mots retenus érigés en silence que seuls l’oreille aguerrie et le corps libéré peuvent surprendre. Rêves gravés sur leur peau de métal et de terre, corps rêvant des chemins dans leurs yeux aux frontières de l’absence, dans le regard détourné. Toute une écriture de matière et de couleur comme chant.

              Couleurs, lumière comme terre pétrie, pigments revenus sur leurs traces à leur origine. Variations, voyages ouverts à d’autres civilisations, d’autres représentations, transmis par la couleur. Ici, la couleur, signature de l’œuvre, écrit l’artiste et son monde.

     

    Daniel Rivel


     

    http://www.christiandiverres.com

     

    Photographie Christine Rivel-Ruffin

     

     

     

     


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