• Respirations d'artistes

    Quand les artistes et leur art m'inspirent...

    Dès les premières rencontres fulgurantes avec l'art, lors de visites d'exposition, de partages avec des peintres, sculpteurs, auteurs, musiciens... mon écriture a tenté de saisir l'essence de mes émotions face à leurs oeuvres, leurs témoignages.

    Ouverture du regard intérieur, rendez-vous avec un inconnu fertile et fascinant.

    Au fil des années, j'ai engrangé ainsi des textes d'une écriture poétique au caractère différent, empreint de plus de liberté.

    Cet espace est dédié à les accueillir...

     

     

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    Les 'guetteurs' de Christian Diverres.

     

    A Christian Diverrès

     

              Des statues jets, statues pieux, statues repères arrivent au-delà du bois, par-delà la terre, le fer et la cire, au-travers de la couleur et des gravures. A ce rendez-vous qui semble fortuit nous sommes à l’heure, à leur temps pour une rencontre. Chacune a cette marque originelle qui fabrique une unité de leur diversité. Dans l’immobilité s’écrit une ascèse, un mouvement hors du geste. Depuis le feu des couleurs et leurs éclats, leurs empreintes se dessinent un chemin vers la terre et ses teintes de force et de cuisson. Terre brûlée, fumée, du même habit de bure que scandent les dernières arrivées. Une rencontre entre des mendiants en figures et des mendiants d’humanité, et c’est un ravissement. Ou peut-être est-ce seulement une âme rendue à la solidité brute de la matière ? Ces veilleurs auraient-ils une âme ? Nés de la main regard et sang et de l’œil rêves, visions et modelage. L’œil, le regard donneraient la forme, le visage. Leurs visages, ce peu de détails, presque polis dans une matière rude, nous offrent ce miroir où nous retrouvons notre visage et tous ceux que nous portons comme des reflets fragiles.

              Bergers des temps de débandade sur les déserts que nous fabriquons, ils semblent voir arriver d’autres temps, d’autres espoirs. Maasaï, peuples bergers de la vallée de l’Omo, coureurs de l’immobile, guetteurs des plaines hauts levés sur une jambe, arpenteurs des pays de longues steppes, mendiants ou rois détiennent-ils les secrets des éléments qui les bâtissent et qui à nous aussi donnent structure ? Chanteurs, leurs bouches closes. Chanteurs au cœur du bois, au centre de la matière, vibration subtile qu’il nous faut décrypter. Certains parlaient d’une voix imperceptible qui m’effleurait et courait sur ma peau et mon regard. Tout en regard depuis leurs yeux intérieurs ils n’ont aucun besoin d’être re-présentés Sur la pâleur d’un visage de peu de gestes. Leur absence illumine ces visages plus réels qu’une image toute pétrie de formes. Sculptures d’élan, d’idée et de parole, gardiennes des plis et des tissus, du fer et des langages gravés sur les chemins d’écho de leurs corps, sur leurs vêtements. Nous répondons à leurs messages par la résonance que répercutent nos corps. Toute la force de l’élan et la sérénité des mots retenus érigés en silence que seuls l’oreille aguerrie et le corps libéré peuvent surprendre. Rêves gravés sur leur peau de métal et de terre, corps rêvant des chemins dans leurs yeux aux frontières de l’absence, dans le regard détourné. Toute une écriture de matière et de couleur comme chant.

              Couleurs, lumière comme terre pétrie, pigments revenus sur leurs traces à leur origine. Variations, voyages ouverts à d’autres civilisations, d’autres représentations, transmis par la couleur. Ici, la couleur, signature de l’œuvre, écrit l’artiste et son monde.

     

    Daniel Rivel


     

    http://www.christiandiverres.com

     

    Photographie Christine Rivel-Ruffin

     

     

     

     


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    En hiver 2019, j'ai eu le privilège de pouvoir assister au travail de recherche chorégraphique et aux répétitions de la création d'Abou et Nawal Lagraa intitulée Premier(s) Pas.

    Cette pièce est l'aboutissement d'un programme destiné à donner une seconde chance à des danseurs(ses) n’ayant pu relever certains challenges professionnels au cours de leur parcours. Ces moments se déroulaient dans un édifice du 17e siècle réhabilité et reconverti en studio chorégraphique : La Chapelle Sainte-Marie.

    J'en avais tiré une énergie créatrice portée par les corps des danseurs en recherche de cohésion et de beauté.

    Un grand merci à Abou, Nawal et tous les danseurs pour leur accueil chaleureux.

     

    Premier(s) Pas. Création d'Abou et Nawal Lagraa

     

     

    n’avoir sur l’espace

     qu’un geste inconnu à jeter

    jusqu’à l’écriture vraie

     un geste d’après nature

     sculpture de l’instant

     sans cesse revisitée

     pour un mouvement mis en chair

     et faire histoire de sa fugacité

     

    *****

     

    gestes mis en corps

    en extraire une langue

    hors de tout phonème

    graver dans l’espace

    l’émotion

    son écriture

    de trouble

    de colère

    d’angoisse

    de joie

     

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    à chaque descente

    au plus dur de soi

    aux mémoires du corps

    à la recherche d’un éclair de danse

    son écho de sueur

    sa part de souffrance

    les blessures mordent à nouveau

    les ombres s’agglomèrent

    se crispent dans les muscles

    ankylosent les articulations

    percent les os

    traversent le regard

     

    Premier(s) Pas. Création d'Abou et Nawal Lagraa

     

     

    blessure de lumière

    la première

    son éclair d’ombre

    encore

    cisaille le corps

    épouvante le regard

     

    la chute reprise

    et l’épaule derrière

    les genoux

    les pieds

    brûlés de frottements

    les mains

    la joue au sol

    le corps claque

    la journée inscrite

    dans les muscles

    sous les pieds salis

    par tant de traversées

     

    *****

     

    travailler

    le geste

    apprendre

    répéter

    le geste

    repris

    répété    répété

    le geste

    encore et encore

    le geste

    à nouveau

    repris

    le geste

    encore

    toujours le même

    effort

    sueur

    sueur encore

    puis le geste

    exact

    puis la phrase

    puis la danse

    dans les corps

    hors des corps

     

    Premier(s) Pas. Création d'Abou et Nawal Lagraa

     

     

    les corps posés sur la portée

    entre ciel et terre-enfer

    tels les portes du temps incorporé

    les corps syncopés

    corps-traits

    coma

    fondés sur leurs pieds de glaise

    ancrés dans l’énergie

    les corps au-dessus du sol

    en ligne tendue

    en courbes

    nouvelle écriture de chair

    de vent-trace

    au vol d’un oiseau

    sur l’espace libre

    corps-lien passant du solide au fluide

    dans l’intensité du geste

    une légèreté libre-soumise

    dans une masse-force éclairée

    par cette matrice-musique

    pour se reconnaître

    se renaître corps-note

    d’un nouveau solfège

    dans une sculpture mouvante

    sans cesse recommencée

     

    Premier(s) Pas. Création d'Abou et Nawal Lagraa

     

     

    rien ne restera du travail pesant

    toute trace de charbon effacée

    sur les corps en sueur

    toute écriture faite

    le geste joue la phrase

    et danse

    lumière

    sur les tableaux de la chapelle

     

    Premier(s) Pas. Création d'Abou et Nawal Lagraa

     

     

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     Photographies Christine Rivel-Ruffin

     

     

     

     

     

     

     

     


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    Les salles du Groupe d'Art Contemporain d'Annonay accueillent du 6 mai au 4 juin 2017 la peinture de Nicolas Guiraud.

    "Sa peinture s'inscrit dans une démarche de scrutateur de la vie, d'observateur du quotidien avec une acuité et une lucidité exceptionnelle  sur la société dans le paysage urbain. S'il n'avait été peintre, je suis totalement convaincu qu'il eut été écrivain. Sans le moindre verbe, ses oeuvres disent, parlent, racontent et finalement dévoilent un récit, une histoire ou même une vision." Henri Marc

    Nicolas Guiraud

     

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    vision-visage

    exposition floue

    soi-même à l'heure de l'incertain

    le brouillard ou le doute

    ce qui fut

    est passé à autre chose

     

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    ombre-homme

    l'oeil du profond

    sur l'étendue du désert

    que seul nous arpentons

    entre les chambranles

    des personnes-pieux-figures

    vibrantes de brumes

    ourdissant un métier

    qui tombe de nos mains

     

    *****

     

    nécessité du flou

    pour un autoportrait à l'absence

    le temps enfonce    efface

    jusqu'à l'ombre

    sujet-regard

    avec toujours le sens à définir

    à trouver

    sous les écorces

    la transparence serait-elle

    trompeuse

     

    DANIEL RIVEL

     

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    Photographie Christine Rivel-Ruffin

     

     


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    Rencontre à Vanosc (Ardèche) lors d'une soirée de l'association La Vanaude, avec le pianiste argentin Miguel Angel Estrella, fondateur de Musique Espérance. Nov 2013

     

    Miguel Angel Estrella

     

     

    Miguel Angel Estrella

     

    homme au visage nié  aux yeux aveuglés  sous les bandeaux et le sac

     

    homme au corps drapé de mépris dans la nudité des disparus

     

    homme aux mains fragiles  aux mains blessées de ne pouvoir courir sur les claviers

     

    homme à l'esprit jeté dans les flammes de la torture

    renaissant pour jaillir au jour de lumière sur les partitions de tes mondes

    réhabilitant l'Homme tout entier malgré ses abandons    ses soumissions    ses démissions

     

    homme à l'oreille attentive coutumière des paroles tendues entre les souffles

    sans aucun murmure pour les soutenir

     

    homme de parole lente et pleine    porteuse du poème de ta terre    des mots semés aux labours    des récoltes dormant dans les caves des paysans jusque là empêchés et qu'une main libéra

     

    homme de mémoire et de pardon    de nouvel envol

    refusant l'oubli et ses cendres jetées sur les braises qu'un prochain coup de vent attisera

    le pardon n'efface pas le mal  il le tient à distance pour retracer les chemins du possible

     

    vigile tu nous rappelles à l'éveil

    si l'homme s'endort  l'horreur se redresse

     

    homme qui ouvre l'homme de misère aux richesses qui l'habitent et aux richesses de l'autre par le souffle  la musique et le verbe  sur nos terres de sel et de pauvreté

     

    Daniel Rivel

     

     

    (photo Christine Rivel-Ruffin)

     

     

     


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